De la liberté de siffler

16 octobre 2008

Dans cette triste affaire des sifflets, il semble que le gouvernement ait perdu tout sens de la mesure, ou tout point de repère, ou tout sentiment démocratique, pour qu’il s’attaque ainsi à sa seule source de légitimité, c’est-à-dire à la liberté d’avoir une opinion et de l’exprimer.

Dans cette triste affaire des sifflets, Il semble aussi que les grands médias veuillent à tout prix qu’on soit français, tout en ayant largement oublié ce que cela signifiait.

Car enfin, de quoi parle-t-on? Parle-t-on du devoir d’aimer sa patrie? Parle-t-on du devoir d’être heureux? Parle-t-on du devoir de masquer ses peurs, ses révoltes, ses contradictions? Parle-t-on du devoir de se taire lorsque son opinion ne correspond ni à la majorité, ni au gouvernement, ni aux autres opinions?

Quand parlera-t-on vraiment de la démocratie? Quand rappellera-t-on que la démocratie donne à tout les citoyens le droit de s’exprimer, de s’exprimer contre la démocratie elle-même ou de s’exprimer contre ce qu’elle fait?

Quand parlera-t-on vraiment de la république? Quand dira-t-on que notre république est fille de celle de 1789, de celle qui mettait au premier rang le droit de s’opposer, de contester, de défendre ses opinions contre la force et contre la tradition?

Quand parlera-t-on vraiment de la marseillaise? Ce chant de liberté. Quand dira-t-on que la « tyrannie » qu’elle combat est précisément celle qui musèle les peuples, qui leur impose le silence, qui les force à se taire ou à clamer des louanges?

Quand parlera-t-on enfin de la France? Quand dira-t-on que c’est par le droit de dire et de parler, par le droit de construire et de contester, par le droit de critiquer la France et par le droit de l’aimer, par le droit d’y être heureux et par celui d’y être malheureux, par le droit de la faire et par le droit de la refaire, par le droit même de s’y rebeller… et par liberté de siffler

qu’on est français.

5 Réponses to “De la liberté de siffler”

  1. Criticus Says:

    Ce qui est incohérent dans ta subtile démonstration, excellent Cratyle, c’est que tu reproches – à juste titre – aux médias de ne pouvoir définir l’identité française autrement que par un hymne et un drapeau, mais que, de ton côté, tu en donnes une définition a minima.

    Si, être français, c’est ce que tu dis, alors, le monde entier est français !

    Or, une simple observation de la réalité du monde prouve le contraire…

  2. Rubin Says:

    Attention aux syllogismes, mon cher Roman ! Cratyle décrit, avec beaucoup de style il est vrai, les valeurs portées à ses yeux par l’identité française. Que d’autres identités portent certaines ou même l’intégralité de ces valeurs n’enlève rien à sa démonstration !

    Encore heureux que nous ne soyons pas les seuls à nous reconnaître autour de ces valeurs !

  3. Criticus Says:

    J’avoue avoir péché par excès de syllogisme… J’ajoute que je suis d’accord avec les valeurs défendues par Cratyle, en y ajoutant la langue française, qu’il utilise avec brio… et que nous partageons avec d’autres peuples. Mais cela ne suffit toujours pas à faire une véritable identité…

  4. Eric Says:

    Football et démocratie…

    Tant qu’on ne s’égorge pas dans les stades, c’est déjà ça. Et on se demande pourquoi les suporter de je ne sais plus quel club espagnol ont déployé une banderole en l’honneur de jorg haider, ce week-end.

    Ce genre de débat (perdu d’avance pour la gauche), c’est ce qu’on peut appeler le joker de la droite. A sortir en cas de crise et ça marche à tous les coups.

  5. Criticus Says:

    Relativisme, encore et toujours… pourquoi ramener les supporters racistes ?

    Les bruits de singe, les banderoles haineuses, etc, n’excusent pas les sifflets, certes moins graves (mais scandaleux cependant) !Cette attitude me dépasse.


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